[box type= »info » ]C’est le dernier article sur la Thaïlande avant de découvrir le Myanmar (Birmanie).[/box]
Pim affiche très souvent de brusques changements dans ses idées, que ce soit pour des détails ou quand il est question de se rendre quelque part: m’ayant filé rencard à Chom Thong à 60km à l’ouest de Chiang Mai, après une longue attente, j’ai trouvé une petite place dans un songthaew bondé, au total presque 3 heures pour me rendre à destination et visiter un des temples les plus vieux (XV s.) et des plus adulés du pays. Pim avait également prévu deux journées à son lieu de méditation, en pleine jungle, sans électricité…
C’était sans compter sur ce coup de téléphone impromptu, reçu le soir même, qui lui annonçait une randonnée Bouddhiste sur le mont Doi Chiang Dao, en compagnie de son Maître, qui commençait deux jours plus tard à 4h du mat…évènement auquel elle voulait participer depuis 3 ans.
Changement important d’itinéraire, et de mon côté, une approbation totale , ma doudoune du Vietnam étant toujours bien enroulée dans mon sac…
Le temple de Wat Tham Pha Plong
C’est le lendemain, en fin d’après midi, que nous atteignons le temple de Wat Tham Pha Plong, au nord de Chiang Dao, qui est également un lieu d’enseignement Bouddhiste renommé, 500 marches mènent au temple, dans un environnement bien vert.
Sous le Chedi, une grotte est aménagée en lieu de culte, un passage mène au sommet , de nombreux maîtres Bouddhistes ont enseigné ici, témoin cette statue en cire.
Avant le départ du lendemain à l’aube, il faut dormir, tout est prévu et gratuit, un superbe dortoir en bois peint surplombe la jungle de Chiang Dao, difficile de ne pas se sentir en paix.
A l’intérieur, c’est simple et vaste, on a l’embarras du choix, on dort à même le sol.
4h du mat, il fait nuit, c’est l’heure de se réunir en bas des marches, sur le parking d’arrivée, l’organisation est exemplaire, des pickup récupèrent nos sacs, les provisions, les tentes, qui vont être acheminés par des porteurs, c’est un peu long car il y a beaucoup de matériel, une trentaine de personnes en comptant les moines. Le jour va se lever, Pim pose avec son maître et subit une crise de selfie avant de monter dans le pick up qui nous amène au pied de la montagne, il est déjà 7h30 quand nous finissons de manger les plats offerts avant d’entamer la montée.
En route pour le mont Chiang Dao !
Et c’est parti !! Les deux premières heures sont fraiches, le chemin et raide et glissant par endroits, le sol est très argileux, heureusement il ne pleut pas et j’ai du mal à imaginer le trajet inverse en descente, encore moins sous la pluie.
Le chemin bascule enfin sur l’autre versant qui est ensoleillé, traverse des champs de hautes graminées, clairsemées de bananiers, je ressens la chaleur des rayons solaires jusque dans mes os.
Un peu plus loin, une superbe bananeraie sauvage précède le retour dans la forêt qui est maintenant agrémentée de roches et de lianes épaisses.
Il est presque midi, c’est l’heure de la pause déjeuner, là encore, tout est prévu, des plats de riz bien épicés dans des boites en polystyrène, comme on en trouve partout en Thaïlande, les moines se joignent à nous.
Après le repas, le maître enseigne oralement la philosophie Bouddhiste, selon la tradition ancestrale depuis l’époque de Gautama Siddhartha, au Népal. J’avais remarqué pendant le repas qu’il ne manquait pas d’humour au second degré et d’auto-dérision façon « pince sans rire ». Son discours a bien duré 1 heure, évidemment en Thaï, impossible de vous faire un résumé et Pim n’a pas su ou plutôt pas voulu me donner le thème … j’étais de mon côté à moitié endormi sous la chaleur, assis sur ma roche, faisant tous les efforts possibles pour filmer et photographier la scène. Je ne diffuse pas la vidéo ici, car le maitre était affublé un peu légèrement, et il n’est pas correct de diffuser des images de moines dans cet état, j’ai donc édité les photos de façon à « cacher ce sein que l’on ne saurait voir ».
Nous repartons, le paysage passe à découvert pendant un bon moment, on aperçoit des crêtes, le soleil cogne, ça grimpe à nouveau, nous avançons péniblement, quand à Pim qui a bien changé physiquement depuis 2011, elle est dernière, à des kilomètres. Des cerisiers sont en fleurs, comme à Chiang Mai l’autre jour ; à l’approche du camp, le rouge de la terre s’intensifie, les lianes sont plus denses.
L’arrivée au camp
Me voici enfin au camp, improvisé dans le sous-bois, les premiers arrivés depuis un bon moment s’affairent à monter des tentes, distribuer l’eau et préparent un feu. Ne voyant pas Pim rappliquer après une demi -heure, je décide de repartir à sa rencontre, je la croise après plus d’un kilomètre, appuyée sur son bâton, et prenant tranquillement des photos d’oiseaux, il reste pas mal de montées abruptes à franchir avant le camp.
Le coucher de soleil
Mes nouveaux amis ne comptent pas en rester là, ils se préparent à rejoindre un point de vue pour assister au coucher de soleil, j’hésite un peu, Pim est écroulée, j’y vais, profitant de ma lancée. Au bout d’une demi-heure nous atteignons la crête, la végétation change complètement, quelques arbres tortueux recouverts de plantes épiphytes ouvrent l’espace.
C’est la saison sèche, mais l’humidité de l’altitude permet à quelques plantes de fleurir.
Et c’est le coucher de soleil, un moment que j’aurais vraiment démérité de manquer en restant allongé dans le camp. Le retour fût épique, je suis resté à la traine avec deux femmes qui avaient des difficultés à redescendre, j’étais le seul des trois à posséder une torche, nous nous sommes égarés dans les chemins en arrivant sur le plateau, pour finir par totalement nous perdre dans la pampa. Après avoir demandé la direction de notre camp à plusieurs personnes, l’une d’entre-elles a fini par nous aiguiller sur la bonne voie.
Méditation au sommet avec une météo extrême
La nuit fût tout simplement glaciale, pas froide, pire qu’à Mai Chau au nord du Vietnam, le damart, la polaire, la doudoune et le duvet ne suffisaient vraiment pas, et c’est à quatre heure du matin que j’ai entendu les premières casseroles s’entrechoquer, dans la nuit noire, nos amis s’apprêtaient cette fois-ci à rejoindre le sommet du mont Chiang Dao pour assister au lever du soleil, les tentes étaient détrempées. J’ai vite compris qu’il n’y avait aucun intérêt à rester là à se congeler, j’ai suivi le groupe dans la brume épaisse, cette fois-ci accompagné par le maître Bouddhiste. La visibilité était nulle, même avec ma lampe qui porte à bien plus de 100m. Le plus tordant c’est que nous nous sommes perdus comme la veille, au moins une demi-heure, tombant sans cesse dans les mêmes culs de sac végétaux, demandant à tous les camps environnants le chemin vers le sommet.
Il fait encore nuit quand nous atteignons le mont Chiang Dao, et là…c’est un vent glacial qui nous accueille, la brume ne fait qu’empirer, accompagnée de pluie fine. Le groupe commence à s’installer à même le sol, en position de lotus, attendant l’arrivée du maître qui va guider une méditation qui va durer à peu près une heure, ma vidéo rend pas mal l’ambiance de cet instant, il faut être motivé!
Bilbo le Hobbit
La moitié de ma main droite restera exsangue, tel un bloc de glace, pendant plus d’une heure, le temps ne s’améliorera pas d’un pouce, le soleil n’apparaitra pas pour réchauffer les corps, passé la première descente vers le plateau, on se retrouve à l’abris du vent, ici le paysage est digne du seigneur des anneaux ou autre heroic fantasy.
Retour au camp
De retour au camp, les moines entament la bénédiction quotidienne avant le déjeuner, la nourriture leur est fournie gracieusement par les citoyens lambdas, un moine même seul doit suivre ce rituel avant chaque repas. Le fait de ne pas travailler pour acheter sa propre nourriture est une aide pour se détacher du monde matériel et également développer de la bienveillance et de la protection pour ses semblables.
Finalement, de la pluie est annoncée en début d’après midi et le groupe décide de lever le camp, l’expédition était prévue à l’origine pour deux nuits. Le retour fût très long et j’ai enfin pu tester avec Pim l’endroit que je redoutais en début de parcours, et réellement sous la pluie, des toboggans de boue sur lesquels nous avons glissé des tas de fois, avançant à tout petit pas, tentant de nous accrocher le mieux possible aux tiges du bord de chemin, mais par endroit cela ne suffisait pas et nous sommes rentrés couverts de boue, surtout Pim 🙂
Selfies de Phim sur son facebook.
Quelques minutes plus tard, dans le pick up qui nous ramène au parking, le réseau 3G me permettra de lire sur mon téléphone une information qui me glacera le sang : l’équipe du journal Charlie Hebdo, en France, venait de se faire assassiner par des terroristes. Les sacs n’arriveront hélas pas avant le lendemain, après 14h ; la pluie et la boue ont ralenti les porteurs malgré leur incroyable technique de marche sur ce type de sol. J’avais acheté un billet d’avion pour Bangkok vers 15h, en comptant large, vu que nous étions censés arriver, à l’origine, avant midi le lendemain matin, en repartant dès l’aube. C’est donc mon premier avion raté de ma vie, mais pour la bonne cause: une formidable expérience en compagnie de Thaïs et de moines.
Merci Stef, très beau reportage! waouh, ça devait défriser
les poils de nez, la-haut!
Très sympa tes reportages Stéphane, agrémentés de beaux clichés . J ai hâte de voir la suite sur le Myanmar que j’ai connu il y a quelques années et dont je suis sûr que tu me surprendras par ta vision.
Bravo.. Philippe.. de Phuket.
Magnifique ascension… perso, je n’aurais jamais eu la force mentale et physique de la faire… conditions rudes!!! Merci encore pour le récit et les photos évidemment.. ça donne envie de réaliser cette marche.
Oh non, c’était épuisant, mais quand même très loin d’une randonnée extrême, je ne suis pas un fou de montagne à la base, pas du style à dépasser 3500m d’altitude facilement. Les moines et autres personnes présentes n’étaient pas non plus des pro de la rando. Le plus difficile fut cette matinée dans le vent glacé sous la pluie fine.